Journée de la paix à Goma. Crédit photo: Charly Kasereka |
La paix :
que faut-il en dire en République démocratique du Congo où, depuis 20 ans, la
guerre déchire de nombreuses familles et les endeuille ? Qu’est-ce qu’il
faut en dire devant le chômage toujours plus fort et les épidémies encore
invaincues ? La liste est longue ! A l’occasion de la célébration de
la journée internationale de la
paix initiée par l’ONU, des jeunes congolais expriment ici leurs pensées
sur la paix.
Le journaliste et blogueur Fidèle Bwirhonde de
Lubumbashi perçoit les enjeux de paix bien au-delà des tirs des canons. Il faut
en plus, des écoles pour des élèves et des emplois pour les parents, bref, une
paix sociale. « La paix, promesse
éternelle, ne devrait plus être que l'absence de la guerre. Sinon, on dirait
que Lubumbashi est en paix ou que telle femme violée par sa propre armée serait
en paix plus qu’un réfugié qui a fui la guerre. Non, ce fils de Beni ne verra
pas la paix tant que deux camps s'opposeront au mon de la paix. Cette paix,
nous la connaîtrons quand le dirigeant comprendra qu'il n'est pas éternel ni
indispensable et qu'il prêtera enfin oreilles aux vrais cris du peuple. »
A 24 ans, il n’a
pas connu de paix
Le journaliste et blogueur Blaise Ndola de Goma,
dans la très meurtrie province du Nord-Kivu, donne un témoignage poignant :
« J’ai 24 ans et incarne le
sentiment de toute une génération marquée par le manque de la paix. » Il
poursuit, pathétique :
Blaise Ndola. photo de profil sur Twitter |
« Etouffée
par les bruits des balles, des bottes des militaires, des pas et cris des réfugiés
et déplacés, la paix est une affaire d’autres pour toute ma génération. Là où
les balles ne crépitent pas, la famine et les maladies tuent aussi que les
armes. Si nous avons hérité de l’absence de paix de nos parents, nous n’avons
pas le droit de faire la même erreur pour nos enfants. Nous avons tous le droit
de vivre libre dans un pays où tout le monde aura le droit de rêver, de
planifier pour le long terme et de bâtir fort et durable sans crainte d’un
lendemain troublé. »
Mais Blaise croit en un lendemain qui chante et
écoute encore cette parole de Patrice Lumumba, premier chef du gouvernement de
la RDC : « Les rives du grand
fleuve, pleins de promesses sont désormais tiennes. Cette terre et toutes ses
richesses sont désormais tiennes,… et tu feras du Congo, une nation libre et
heureuse, au centre de cette gigantesque Afrique Noire ».
Jean-Chrysostome Tshibanda, slameur et enseignant de
français, a l’âme en peine lorsqu’il faut dire paix. Bien plus, c’est l’explosion
de révolte au fond de son cœur lorsqu’il pense à la paix qui manque :
J'aurais
voulu prier, mais si grande est ma peine
Que, bien au contraire, j'ai envie de pleurer.
Dix millions de morts, est-il vrai que c'est rien dans la pensée humaine ?
Dix millions de morts, qu'est-ce que c'est ? C'est rien,
Ce sont des Congolais, qui n'ont pas les moyens
De réclamer vengeance à la face du monde
qui, d'ailleurs, se moque de pareille demande.
Dix millions de morts, qu'est-ce que c'est ? C'est rien.
Ô pauvres Congolais, qu'on prend pour des vauriens !
S'il faut satisfaire la soif de la richesse
D'un seul individu, faudra-t-il que sans cesse
plusieurs fanatiques s'entretuent bêtement ?
Or même les bêtes agissent autrement.
Les animaux qui sont d'une semblable espèce
ne s'entretuent pas : ont-ils plus de sagesse ?
De quelle espèce es-tu, toi qui tues des humains,
toi qui tues tes semblables sans être plus malsains ?
C'est pas la frontière qui divise les hommes.
C'est le manque d'amour qui provoque les drames.
Il faut concilier tous les pays voisins.
C'est un gage de paix, nous en sommes certains.
Enterrer les conflits s'impose à cet effet.
Que, bien au contraire, j'ai envie de pleurer.
Dix millions de morts, est-il vrai que c'est rien dans la pensée humaine ?
Dix millions de morts, qu'est-ce que c'est ? C'est rien,
Ce sont des Congolais, qui n'ont pas les moyens
De réclamer vengeance à la face du monde
qui, d'ailleurs, se moque de pareille demande.
Dix millions de morts, qu'est-ce que c'est ? C'est rien.
Ô pauvres Congolais, qu'on prend pour des vauriens !
S'il faut satisfaire la soif de la richesse
D'un seul individu, faudra-t-il que sans cesse
plusieurs fanatiques s'entretuent bêtement ?
Or même les bêtes agissent autrement.
Les animaux qui sont d'une semblable espèce
ne s'entretuent pas : ont-ils plus de sagesse ?
De quelle espèce es-tu, toi qui tues des humains,
toi qui tues tes semblables sans être plus malsains ?
C'est pas la frontière qui divise les hommes.
C'est le manque d'amour qui provoque les drames.
Il faut concilier tous les pays voisins.
C'est un gage de paix, nous en sommes certains.
Enterrer les conflits s'impose à cet effet.
« On est
habitué à vivre sans paix »
Presque lassé, Thierry UWAMUNGU de Kigali au Rwanda rappelle
que la paix est un droit pour l’homme. « Des
plus belles paroles ont déjà été dites contre la guerre et des grands hommes de
paix ont servi de très bons exemples. Mais chaque jour, on attend des nouvelles
tragiques des pays en guerre, des affrontements, des bombardements, etc. On est
habitué à vivre sans paix. Où est donc passé notre droit à la paix?
Travaillons tous à son émergence par le respect de la dignité de chaque être
humain, de chaque peuple, de chaque nation, de chaque État. Et si on commençait
par son prochain? Collègue de travail, voisin du quartier ? Moi j'ai
décidé de commencer et toi? »
« Transformons
nos peines en forces »
On ne présente plus Chantal Faida Mulenga,
journaliste et blogueuse, présente dans plusieurs actions de jeunes pour la paix
et le progrès social. La peine qu’inspire l’absence de paix qui n’a fait que
durer, deux décennies déjà, elle n’éteint pas la flamme d’espoir et invite au
courage. « Transformons nos peines
en forces. » Voici son propos : « Un millier de déplacés internes vivent le calvaire innommable à
cause des conflits violents en RD Congo, il y a deux décennies. De Masisi en
passant par Rutshuru et Béni, la paix durable, gage du progrès social, est loin
d’être un mode de vie pour les habitants de ce territoire. Ces échecs sont pour
nous des leçons précieuses. Pour moi, la paix c’est le symbole de gloire, car
elle rend la dignité jadis arrachée à l’humain. J’invite à la tolérance dans
l’échange d’idées, l’émulation dans l’action pour la paix.»
Concluons avec cette pensée de Paola Nzey,
congolaise qui vit en Afrique du Sud depuis un an : « La paix est un petit mot mais d'une grande valeur et, plus qu'indispensable
dans la vie humaine. Nos familles, nos sociétés en ont besoin! En cette année
de Miséricorde (Eglise catholique),
nous voulons et désirons, de tout notre cœur, vivre cette Paix en RDC! »
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