Lubumbashi candidat « ville créative » Unesco

Lubumbashi wantanshi
Photo M3 Didier
Lubumbashi « ville créative », et patrimoine culturel de l’humanité, la candidature est à l’Unesco depuis juillet 2015. Deuxième ville de la République démocratique du Congo, la "capitale du cuivre" est porteuse d’une créativité artistique qui mérite d’être inscrite au patrimoine culturel mondial.
« Il y a de l’espoir » à cette candidature, selon Patrick Mudekereza, consultant au projet porté par la mairie de Lubumbashi à l’Unesco. Candidature déposée dans la catégorie « artisanat et arts populaires » (folk arts). La réponse est attendue en 2015, ou l’an prochain.
Une identité minière de Lubumbashi
« Lubumbashi comme ville minière a forgé son identité sur l’exploitation minière », explique le consultant. Deux facteurs influencent les productions artistiques à Lubumbashi : d’abord, l’exploitation minière industrielle coloniale, démarrée en 1910. La ville naît quatre ans après, au tour de l’usine implantée au bord de la rivière Lubumbashi.
Explorateurs occidentaux et trafiquants arabes arrivent au Katanga. Des africains sont recrutés jusqu’en Zambie pour travailler dans les carrières. La ville va affirmer son caractère cosmopolite. Un caractère qui tient à l’exploitation des minerais, selon le professeur Donatien Dibwe, historien. Déjà au 16e siècle, avant la colonisation. « Tout le monde sait qu’il y a du cuivre au Katanga. » L’inspiration artistique va connaître des influences avec ces contacts.
« La culture ouvrière et la création artistique sont intimement liées », explique Patrick Mudekereza.
Au pays des mangeurs du cuivre
Lubumbashi
Lubumbashi, square Forest, en face du bâtiment du 30 juin. Ph M3 Didier
Le second facteur d’influence, mais le plus ancien, s’inscrit même dans l’artisanat local, du Katanga. 3 siècles plus tôt, dans la région de Lubumbashi, Likasi et Bunkeya, les paysans transforment le cuivre. Ils fabriquent bijoux, anneaux et bracelets. Une croisette de cuivre, par exemple, sert de monnaie dans la région de Likasi. Aujourd’hui, c’est symbole de la ville de Lubumbashi, du Katanga. Une femme tenant cette croisette est l’image de la katangaise.
A l’appel du chef du village, les paysans vont « manger le cuivre »[1]en saison sèche, après les récoltes. D’où le monument dit « les mangeurs de cuivre » installé dans la ville de Likasi (à une heure et demie de Lubumbashi) : un homme tenant une croisette.
Dans la commune Ruashi, à l’est de Lubumbashi, mais aussi au centre-ville, deux marchés d’arts s’imposent. Ils proposent des objets divers, faits principalement de cuivre pur ou vert (malachite), fondu ou battu (tableaux). Des sculpteurs rivalisent d’inspirations à travers leurs œuvres : colliers, bijoux de femmes, ustensiles de salon, par exemple. Les touristes sont y sont le plus attendus. En prolongation de cet art, la peinture se montre aussi très inspirée.
Une ville dansante
Mais certaines monuments de cette culture du cuivre, la cheminée de la Gécamines en l’occurrence, s’éteignent, faute de protection. Déjà la montagne de scorie qui accompagne cette cheminée, une des plus hautes du monde, connaît une nouvelle exploitation.
Les arts scéniques, musique, danse et théâtre, par exemple, ont eux aussi connu l’influence de l’exploitation du cuivre. L’orchestre Jecoké, aujourd’hui en veilleuse, a longtemps attiré les habitants de Lubumbashi. Employés de la Gécamines, ils chantent, le soir dans la ville noire, la commune Kenya, les dangers qui les guettent dans les carrières minières. « Ils ne savent pas s’ils vont retourner chez eux », explique Isaac Sumba, écrivain. La Gécamines a aussi entretenu des troupes théâtrales. Un acteur s’est fait une légende : Mufwankolo wa Leza.
Grâce à la diversité ethnique de ses habitants, Lubumbashi, propose aussi une diversité des productions folkloriques. Parmi elles, les Mbudie de l’ethnie luba et les Atudiang, des lunda impressionnent par leur vigueur.
Enfin, la danse moderne : la rumba, beaucoup plus développée à Kinshasa où déjà le professeur Yoka Liye figure parmi les protagonistes de l’inscription de cette musique au patrimoine culturel, à l’Unesco.
Si l’Unesco retient la candidature de Lubumbashi, la ville rejoindra alors le réseau des villes créatives, parmi lesquelles en Afrique centrale, Brazzaville retenue pour sa musique. D’après le conseiller du maire, Jean-Pierre Ngwej, Lubumbashi gagnera en visibilité. Mais aussi les artistes pourront trouver une facilité de déplacement au niveau international, grâce à l’Unesco.




[1] Le chef du village appelait sa population à exploiter le cuivre, généralement ramassé sur des collines appelait : « tuye tulye mikuba », à traduire par « allons manger le cuivre ».

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