RDC: Comme si le recensement de la population était de la peste!

En République démocratique du Congo, la tension monte entre pouvoir, opposition et même la société civile sur la fin du mandat de Joseph Kabila. La subordination de l’organisation des élections présidentielles au recensement de la population constitue aujourd’hui la principale discordance entre les parties, discordance portée par la révision de la loi électorale.
Marche de l'opposition le 13/01/2015 à Kinshasa. Source: @ambadrien/Twitter
Les congolais sont entre 65 et 70 millions, peut-être plus. Nul ne le sait avec précision. Si les élections de 2006, acceptées par plusieurs comme « démocratiques », n’ont pas posé beaucoup de problèmes, la fiabilité du fichier électoral avait lui un tout petit peu dérangé. Ce problème se fera beaucoup plus sentir dans la préparation des chaotiques élections de 2011. Durant de longs mois, voire plus d’une année, l’accès au serveur pour authentifier le fichier électoral a contribué à renforcer la tension et la suspicion entre le pouvoir et l’UDPS alors principal challenger.
C’est dans ce pays donc que finalement, un recensement en bonne et due forme devrait permettre à tout le monde de souffler et espérer ainsi oublier des conflits parfois honteux. Le cas, en plein 21e siècle et dans une « révolution de la modernité ! », des élections basées sur
des estimations. Dans ce pays, le récent recensement de la population remonte à il y a près de 30 ans (fin des années 1980).
La confiance n’existe pas ici
Disons que, la confiance est plutôt une espèce en voie de disparition. On se soupçonne, même lorsqu’il s’agit des vœux ou des salutations que l’on reçoit. A tort ou à raison ? Je ne saurais quoi dire en effet. Au moins, il y a des signes, à propos du processus électoral, qui semblent tourner en faveur d’un certain scepticisme quant à l’organisation du recensement. Joseph Kabila aura totalisé en juin 2016, dix ans au terme de deux mandats successifs. Son régime n’ignore pas combien ce recensement est important non pas seulement pour les élections. Mais surtout à ce propos, après des élections qui ont fortement nui à limage du pays et du régime. Poser les bases des élections transparentes devrait être un gain.
Il y a donc 5 ans qui passent, puis 3 et demi… c’est alors le moment pour procéder au recensement. Dans un pays-continent (235.000 km2) dont l’intérieur est quasiment sans routes, difficile donc d’accès pour plusieurs coins, espérer finaliser le recensement que la contestée loi électorale sous étude au parlement érige en élément incontournable pour l’organisation des élections présidentielles et législatives, il faut attendre un miracle. Ou simplement, il faut se rassurer que l’opposition alertée par une tentative de révision de la constitution pour un mandat interdit à Joseph Kabila, devrait acquiescer.

Des manœuvres
Source: www.ingeta.com
Mais hélas, le germe de la méfiance est manifesté ! Il parait donc clairement, et c’est l’opposition qui le dit, que ce recensement qui pourrait bien finir en retard s’il est expéditif, c’est-à-dire, vers 2016 l’année des élections, est la voie par laquelle faute d’une révision de la constitution, Joseph Kabila restera au pouvoir. La constitution, en effet, l’autorise à rester en poste « jusqu’à l’installation d’un niveau président élu ». Les négociations pourront alors commencer pour de nouvelles élections.
Peut-être que Joseph Kabila n’a pas l’intention de rester au pouvoir au-delà de son deuxième mandat. L’opposition aura donc perdu la chance de voir se réaliser ce recensement important pour le pays. Mais la confiance perdue, tout est difficile. La radicalisation de l’opposition et l’obstination du pouvoir cheminent probablement vers une dérive. Plusieurs ne jurent que par « Burkina Faso », appelant presque le peuple à « se prendre en charge ». Pendant ce temps, d’autres appellent à ne pas « imiter aveuglement » cet exemple et en même temps, envoient des signes de sévérité à ceux qui seraient tentés de descendre dans la rue. C’est la confusion.
Dialoguer
Peut-être que la solution réside dans une entente, un dialogue ou une reconsidération des positions pour éviter le pire. Ah, le pire ou les pires ? Il y en a eu tellement dans ce pays et on n’en finit pas d'en souffrir. Les conciliabules, on s’en lasse aussi, mais ça au moins, ça vaut mieux que le deuil.
Le pouvoir et l’opposition appuyée par la société civile sont en désaccord sur presque tous les plans. Et, j’ai l’impression que le mal vient de la compréhension que pouvoir et opposition ont de leur état. A l’assemblée, par exemple, les députés sont souvent si non toujours enclins à soutenir tout ce qui vient du pouvoir pour ceux de la majorité, et rejeter pour ceux qui sont de l’opposition. Facilement on se trouve dans un face-à-face qui finit par des violences.

Il n’y a pas longtemps, des députés en sont même venus aux mains à l’hémicycle, au cours d’un débat sur une motion de défiance contre un membre du gouvernement.

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