Kolwezi vient d’être secoué, le
lundi 8 décembre dernier, par une marche contre le découpage administratif
comme entendu à ce jour, dans le cadre de la décentralisation. L’Association
socioculturelle Lwanzo lwa Mikuba demande que Kolwezi soit érigé en province à
part entière et refusent qu’il soit le
chef-lieu de la future province du Lualaba comme prévu.
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Une carrière minière à Kawama, Lubumbashi. Ph. M3 Didier |
La
marche a d’abord été interdite par la mairie de Kolwezi avant d’être autorisée.
Au moins quatre personnes ont été blessées par balles. L’information publiée
sur Facebook a eu cette première réaction de Gilbert
Kyungu « Lwanzo lwa
mikuba que veut-il? Qu’est-il (faisait) depuis 2006 pour initier cette
protestation? Finalement ardemment on veut le découpage d'un côté et puis on
refuse d'être annexé de l'autre côté, ça veut dire quoi? Chaque chose a
toujours des conséquences bonnes ou mauvaises, surtout lorsqu'il s'agit de perdre
l'identité katangaise ça crée des sentiments belliqueux. Lorsque le vin est
tiré il faut ... »
La loi sur le découpage déjà votée
La
loi cadre fixant les limites, les modalités de ce découpage existe déjà. Et à
ce jour, fait remarquer un spécialiste des questions de décentralisation, il
est difficile d’espérer une modification. Mais les polémiques n’arrêtent pas
d’enfler sur Kolwezi, la capitale du cuivre et du cobalt katangais. On veut
Kolwezi comme province dans les limites du district du Lualaba.
Les
défenseurs de cette cause, l’Association socioculturelle Luanzo lwa Mikuba dont
le groupe ethnique Basanga « originaire de cette région », s’appuient
sur un principe de la constitution de la RDC. Ce principe change en provinces
les districts actuels sans exclure d’en créer.
Lwanzo
lwa Mikuba ne force rien dans ce cas, à mon sens. Mais où l’on rebute, c’est
lorsqu’elle ne remet pas le dossier dans son contexte global. Celui-ci renvoi à
l’histoire même du Katanga et partant du Congo, à la création définitive des
districts, secteurs et territoires actuels. Le principe primordial a
été « la viabilité des entités ». Les
territoires « peu viables ou
défavorisés étaient regroupés en secteurs » en vue d’en faciliter
l’émergence. Il faut voir la densité de la population et les ressources
économiques. Que Kolwezi fasse parti de la province du Lualaba comme fixé par
cette constitution votée au référendum par la majorité des citoyens dont
certains parmi les leaders de Luanwo lwa Mikuba ont venté les bénéfices, il n’y
a rien de nouveau à ce pays.![]() |
Un blessé de la marche du 8/12/2014 à Kolwezi. Ph. Fr. Kazadi |
Plus
encore, que le constituant ait ajouté au Lualaba le territoire de Lubudi et toute la partie longeant le fleuve, et même jusqu'aux environs de Tenke, qui
n’en faisait pas partie, vient renforcer la thèse de viabilité. Mais ici se
pose vite un problème. Qui n’est pas viable : Kolwezi sans Lualaba ou
Lualaba sans Kolwezi ? Vous vous en doutez : les deux ! Mais là
n’est pas le débat qui m’importe. Je voudrai alerter tout le monde sur les
dangers qu’il y a dans cette dispute. Déjà on enregistre des blessés alors que
tout cela peut se résoudre sous un manguier. Je suis sur un terrain assez
glissant et fort politisé et c’est d’autant malaisé pour moi qui porte des
identités du Lualaba. Je n’ai nullement l’ambition de faire de la propagande ou
la promotion de quelque opinion que ce soit.
Exclusion et manipulations ?
Je
vois dans les yeux des pro et anti Lualaba avec Kolwezi comme chef-lieu des
excès porteurs de germes des violences. Pourquoi donc ? Parce que Kolwezi
est fort riche en ressources naturelles. « Pourquoi Kolwezi
province? Luttons aussi pour que les communes de Manika et de Dilala soient
aussi des provinces à part entière » lançait professeur Joseph Yav
sur Facebook. Les réactions.
Thierry
M'Siri « N’ayez pas peur que l'actuel District du
Lualaba avec comme territoire Kapanga, Dilolo et Kasaji soit une Province, ça
sera une très bonne chose. Pourquoi voulez-vous seulement avoir une province a
dimension de la France? » Maki Munongo Kibassa Maliba « … Vous
parlez des histoires dont (sic) peut-être vous maîtrisez difficilement. Lance
sur votre forum les autres sujets, mais pas celui de Kolwezi. » Patrick Mukonki « Prof
votre Lualaba à Kasaji, Kolwezi sera aussi une province à part entière, si
longue soit la nuit le soleil finira par apparaître n’oublie pas. » Daniel Musomb Mbaz « vous-vous dérangez pour rien, la
ville de Kolwezi ne sera pas une province mais restera une ville, la loi
organique sur le décourage a été votée au sénat … ». C’est sans
commentaire ! Là, les lettrés ne s’entendent pas. Immaginez à quel
radicalisation sont exposés ceux à qui on tient le langage, « on ne lâche rien…, c’est chez
nous ! »
Je
retourne donc dans la constitution puiser un autre argument. La caisse
nationale de péréquation. Il s’agit d’une caisse dont le but est de venir en
aide aux provinces, districts ou territoires défavorisés, pauvres ou sinistrés.
Elle contient des fonds venant d’autres provinces. C’est une géniale idée de
renforcement de l’idéal d’une nation, d’une solidarité nationale. Que l’on
veuille Kolwezi comme province, j’estime que c’est légitime et correct. Mais
que l’on refuse de faire corps avec un territoire avec lequel autrefois on
n’était qu’un, il y a à se poser des questions. Et j’estime qu’en tout cela, il
y a la volonté d’exclure.
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Kolwezi: des membres de l'association Lwanzo lwa Mikuba. Ph. Fr Kazadi |
Des manipulations dangereuses
La
manipulation des populations dans ce dossier tourne lentement au conflit. Le
district du Lualaba a pour chef-lieu Kasaji, un centre urbano-rural situé à une
centaine des kilomètres de Kolwezi, un peu plus au nord-ouest de Lubumbashi.
Avec ses 4 territoires, le Lualaba regroupe plusieurs tribus que certains
anthropologues regroupent sous « l’ethnie lunda. Certes, les lunda et
chokwe y sont majoritaires. Et cela gêne d’autant plus qu’ils ont tendance à
être un peu partout. Des liens forts entre seigneurs de ces tributs existent
encore à ce jour.
On
parle du district de Lualaba avec pour chef-lieu, Kasaji. Or le Lualaba est le
fleuve Congo dans sa cour inférieure. En ce qui me concerne, je vois mal un
Lualaba à Kasaji sans le Lualaba (fleuve) qui lui donne ce nom. Est-ce là un
lien inextricable entre les peuples de cette région ? Sous le Katanga
sécessionniste, cela ne faisait qu’une seule province. Faudra-t-il revenir à la
politique de Mobutu : ne pas placer à la tête des provinces, districts et
territoires des originaires. La course au pouvoir et aux postes accentue les
rivalités et fragilise l’unité nationale.
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