« Tout
communique », on ne peut pas ne pas communiquer. Même la volonté de ne pas
communiquer, n’est-ce pas même une communication ? … Vous l’avez
probablement entendu un jour. Constat vieux d’environ 50 ans, ces affirmations
se sont imposées à nous, à tout. Et nous les partageons, nous les portons en
nous. Pourtant, on pourrait bien s’interroger sur la pertinence et les contours
d’une telle affirmation aux sonorités totalitaires. Au fait, qu’est-ce que cela
signifie réellement et qu’est-ce que ça implique, de tenir de telles
affirmations ? Peut-on soutenir le contraire ? Et si « Tout
communique » réellement, que signifierait alors communiquer, et le
« tout » ? Et si l’on osait croire qu’il y a des choses qui ne
communiquent pas ou pas du tout ? Voilà autant des questions que nous soulevons
pour oser montrer les forces et les faiblesses qu’il y a dans cette affirmation
de Paul WATZLAWICK.
Trois
points me permettent d’éclairer mon propos :
–
Paul WATZLAWICK et son époque
–
La communication est-elle
possible ?
–
Tout communique-t-il vraiment ?
I. Paul WATZLAWICK et son époque
Psychothérapeute,
membre du Mental Research Institute (MRI)
de Palo Alto qu’il rejoint en 1961, Paul Watzlawick a été professeur de
Stanford en Californie, aux Etats-Unis. Il travaille avec l’américain immigré
d’Angleterre Gregory Bateson initiateur du MRI dans le cadre de la recherche et
des applications thérapeutiques, tâche à laquelle s’appliquera Paul Watzlawick.
Le
collège Invisible (Ecole de Palo Alto) regroupe anthropologues, sociologues,
linguistes, psychologues, psychiatres, etc. Les recherches menées s’étendent
sur plusieurs disciplines à la fois ou s’ouvrent à plusieurs
(interdisciplinarité). Gregory Bateson « tente
d’élaborer une théorie transculturelle cohérente dont les concepts pourraient
être appliqués à d’autres types de société ».[1] L’étude
des interactions entre individus et de leur dimension non verbale figure parmi
les thèmes très abordés. Progressivement, Gregory Bateson se plonge dans
l’étude de la communication. En 1942, au cours d’un colloque, il découvre le
principe de la démarche systémique et comprend immédiatement tout
l’intérêt qu’il peut en, tirer. Il faut dire que jusqu’ici, la communication
est vue sous l’angle dynamique des forces et des rapports de cause à effet. « G. Bateson va désormais l’envisager
comme un système de messages fonctionnant sous forme de "boucles"
dans lesquelles l’énergie de la réponse est fournie par el récepteur et non par
l’impact de l’élément déclencheur (d’où l’importance de la notion du feed-back). » Il applique la
démarche systémique aux sciences sociales, notamment à la communication. Cette
approche s’oppose à la conception linéaire (un
peu déterministe).
Il
faut dire que l’Ecole de Palo Alto est opposée, dans ses recherches, à celle à
la mode à Chicago. Ici, Harold Lasswell est en passe d’une quasi- infaillibité
grâce à ses théories propagandistes sur la communication. Professant la
puissance irrésistible des médias. Il prétend, en effet, que propagande rime
avec démocratie et que la première (propagande) est le seul moyen, de susciter
l’adhésion des masses, étant plus économique que la violence, la corruption ou
d’autres techniques de gouvernement de ce genre.[2]
C’est la fameuse « mass communication research » d’où se dégage le
paradigme de la seringue hypodermique inspiré de la psychologie pavlovienne (stimulus-réponse).
L’homme, en dernière lecture, serait devenu quasiment peu réfléchi, si non pas
du tout, impuissant face aux effets des médias qui seraient très puissants.
Cette théorie sert aux politiques à endoctriner, à larguer leurs idéologies
martiales. On est après la seconde guerre mondiale !
De
l’université de Columbia viendra une étude diminuant cette toute puissance
lasswellienne des médias. Reconnaissant la puissance, relative des médias, Paul
Felix Lazarsfeld va estimer que les médias n’agissent pas directement sur les
destinataires. Bien souvent, ils doivent passer par des tiers, plus exposés aux
médias et plus écoutés dans leurs groupes (il découvre l’importance des
groupes). Ces derniers, appelés leaders
d’opinions, relayent les messages et sont perçus avec plus d’efficacité.
C’est la théorie du Two step flow of communication
ou communication à deux paliers.
D’autres
théories viendront contredire la théorie de Lasswell. Notamment celle de Uses and gratification qui suppose que les gens s’exposent
volontairement aux médias pour en tirer quelque satisfaction. Elihu Katz en est
le concepteur.[3]
A
Palo Alto, les chercheurs ont l’avantage de penser pour la première fois la communication comme un système et de porter l’attention à la
fois sur le récepteur, sur le message et sur la relation qui découle de l’interaction entre émetteur et récepteur.
C’est quasiment une révolution pour l’étude de la communication. Celle-ci,
jadis, était vue comme une transmission simple des messages, sans souci de
réaction de l’autre en face ou au bout du fil.
C’est
dans cette communication systémique
que, sans doute, apparaît la contribution de Paul Watzlawick faisant l’objet de
notre réflexion. Le systémisme de la communication, en effet, repose sur six
piliers :
–
La communication est un fait, un processus interactionnel :
accent mis sur la relation que sur l’individu (impotence du feed-back),
–
La communication ne se réduit pas au message verbal. Tout comportement a une
valeur communicationnelle. C’est ici qu’apparaît le fameux « Tout communique » ou « On ne peut pas ne pas communiquer ».[4]
–
La communication est déterminée par le contexte dans lequel elle s’inscrit
(rapports divers entre communicants),
–
Tout message comporte deux niveaux de
signification : contenu
informatif (sentiments, expériences, …) et la
relation qui lie les interlocuteurs,
–
La relation entre interlocuteurs se
structure selon deux grands modèles : le modèle symétrique et le modèle
complémentaire (relation complémentaire, relation égalitaire) ;
–
La plupart de formes de la pathologie
mentale peuvent être ramenées à des perturbations et des dysfonctionnements de
la communication. D’où l’importance de la
métacommunication (une façon de communiquer sur les différents aspects de la
communication).
Il
est à remarquer ici qu’il s’agit bien, ici, de deux types de
communication : interpersonnelle et entre homme et la nature. D’autres vont
jusqu’à parler de communication entre éléments de la nature autres que l’homme.
Ce débat ne nous importe pas pour le moment. Nous nous intéressons à la
dimension interpersonnelle. Mais, le thème (nous) obligeant "Tout
communique-t-il vraiment ?", nous toucherons parfois à d’autres
dimensions.
Dans
une communication comprise comme transmission
des messages, c’est peine perdue de savoir comment ces derniers sont reçus
et ce qu’en pensent le destinataire. Ce niveau est des plus bas du phénomène
communication. Mais au fait, c’est quoi communiquer ? Est-ce
possible ?
2. La communication est-elle
possible ?
Passer
du schéma « transmission » au schéma « relation » de la
communication change tout. C’est toute la conception de l’univers communication
qu’il faut prospecter. Roman Jacobson, linguiste de son état, conçoit la
communication possible (le sens ou le message partagé) entre A et B, lorsque les
deux partagent un même code (langue, signe, etc.), le même contexte ou référent
(cadre de référence : culture, compréhension commune ou rapprochée des
signes, etc.) et naturellement, lorsqu’il y a un contact entre eux. Autrement
dit, la communication vise à établir une relation qui est elle-même le fruit du
partage.[5]
L’anthropologue
de la communication Yves Winkin considère comme point de toute communication « l’ouverture à l’autre ».[6]
Cette communication est faite d’échanges ou
« transmissions
intentionnelles des messages verbaux, des gestes, des regards et des sourires
qu’on échange, des performances relationnelles ». Ces éléments
plongent les sujets (acteurs d’une communication) dans un même contexte, où
l’échange augmente (flot communicationnel) qui les rend prévisibles l’un
l’autre. Chacun agit au moment qu’il faut, en son temps. Ceci est une
performance des codes de la culture commune des habitudes.[7]
Roger MEHL dit la même chose qu’il considère la culture comme la base de toute communication :
« Toute communication s’enracine
dans la culture. Mais la culture n’est pas productrice de communication ».[8] Il
poursuit : « Entre la
culture et la communication, il y a la même relation qu’entre société et
intersubjectivité ».[9]
Alors, je le crois bien, il y a lieu de conclure qu’il y a relation entre
communication et intersubjectivité et entre intersubjectivité et culture. Et
comme intersubjectivité, la communication est d’abord ne rencontre, et c’est ce
qui fait son mystère ».[10]
La
condition première d’une communication est donc la reconnaissance de l’autre
subjectivité qui se présente à nous en vue de créer une intersubjectivité.
C’est al reconnaissance d’autrui. C’est la reconnaissance de l’altérité, de
l’autre, qui pousse à communiquer. Autrement, on communiquerait pour soi-même,
sans l’autre alors. Il s’agit donc, en même temps, de respecter l’altérité.
2.1. Prendre le risque
Lorsque
nous décidons de communiquer, nous prenons un risque : celui de nous faire
tromper, de nous tromper, mais aussi de tromper. En communiquant, nous nous appuyons
sur des signes, des symboles. Des choses mouvantes, pas toujours faciles à
manier. Dans une certaine mesure, la communication sonne comme une menace. Surtout
lorsqu’il s’agit d’aller à « la
rencontre d’autrui ».[11]
Il est donc nécessaire de réunir tout son être, pour ne dire qu’une
chose : celle que l’on a à l’esprit, et de manière claire et distincte.
Et
puisque le langage n’est pas toujours assez pur, fidèle de nous et de notre
être intérieur, il vaut mieux le compléter, l’appuyer d’éléments de
métacommuniaction (gestes, expression de soi, etc.). Ceci suppose de tenir
compte de l’autre : ses sensibilités, ses limites ou problèmes, sa
culture, son éducation, ses idées générales, etc. Et bien entendu, tenir compte
du contexte spatial, du contexte temporel, bref, de tout qui pourrait faciliter
ou bloquer une bonne communication.
Somme
toute, la communication est finalement d’un goût presqu’impossible. Elle est
impossible, constate Roger MEHL. Il y a de l’incommunicabilité en tout
homme. La communication prenant comme base la culture, les valeurs. Ne fût-ce
que de ce point de vue, elle devient impossible, lorsqu’hors des valeurs. « La communication ne peut s’établir
qu’à l’occasion des valeurs ».[12]
Notre souffrance, pouvons-nous l’exprimer et la communiquer. Elle est nôtre,
très personnelle pour être réellement sentie de l’extérieur. Comment communiquer
ma souffrance à autrui ? Serait-ce la lui transmettre comme par contagion ?
Si seulement s’était possible… ! « Je partage ta souffrance »
disons-nous. Compassion, oui ! Mais, n’est-ce pas en même temps une
expression d’incapacité quant à son exécution ? La souffrance, en effet,
avoue R. MEHL, « c’est une réalité qui ne se partage pas ».
Ce
penseur, théologie protestant de son état, ne plonge pas dans un
radicalisme ; loin s’en faut. Il y a un sens à ces limites de la
communication dans le règne de l’éthique et de l’économie du péché. Ces limites
deviennent intelligibles lorsqu’on reconnaît la faillibilité de l’homme
perfectible. Cette perfection qui n’est qu’un don de Dieu, sera rétabli entre
lui-même et les hommes, et ceux-ci entre eux.[13]
La communication, pour lui, est donc un don de Dieu. L’homme ne sait pas communiquer,
mais Dieu.
Nous
venons de comprendre que la communication, loin de se résumer en Dieu seul
comme la conçoit Roger MEHL, est difficile, parfois impossible. On peut
cependant s’en approcher, voire la réussir (pas dans une totalité totalisante).
Cela arrive, mais pas souvent. Nous passons plus de temps à prévaloir nos
opinions, nos sentiments, notre expérience, notre ancienneté, nos diplômes,
notre puissance sur celle des autres. A la fin de tout, nous nous plaçons comme
un « JE » fort, digne d’être écouté … face à un « tu »
négligé, minable ou peu considérable. Mais, rassurons-nous, « la relation de possession [ou de
domination ou même d’indifférence] tue la
communication ».[14] Parallèlement,
BOULLET Michel précise que l’intelligence humaine et l’esprit critique finissent
toujours par se révolter face à une situation de domination et reprendre sa
liberté, jusqu’à ce qu’il se sente rétabli dans sa dignité d’homme.[15]
Que devient alors la communication ?– Echouée. Une communication qui
réussir ou qui veut réussir tient compte de l’autre et l’élève à la dignité
d’homme. C’est le minimum exigible et le point de départ d’une
« communion », d’être « un » ou de mettre
« ensemble », sens premier du latin communicare.
3. Tout communique-t-il
vraiment ?
La
communication est complexe. Son champ est tellement assez vaste, au point que
le consensus sur la définition de ses concours est pratiquement difficile. Il
se dégage de ce que précède que « la
communication est le fait humain fondamental. Bien plus, elle définit l’humanité : nous sommes d’autant plus
humains que nous communiquons » [16], que nos capacités de communiquer,
d’entrer en communion (pas nécessairement être d’accord !) avec autrui. Nous l’avons dit plus haut, la communication
ne se produit qu’à l’occasion d’un langage, d’une expression. Et s’exprimer
c’est s’appliquer à dire verbalement, par écrit, par le geste, les images, la
parole ou par les arts ce que l’on ressent au fond de soi-même. La communication
est ce processus d’expression de soi, de ce qui se présente à soi, à un autre
(un tiers) dans l’objectif d’obtenir de lui une réaction certaine, une
approbation ou d’établir une relation. Et la meilleure forme de communication
est le dialogue. Ici, tout le monde se met plus ou moins au même pied
d’égalité. La vraie, la bonne communication ne manipule pas. Elle n’est pas une
propagande. Car qui épouse la propagande, en fait, réduit son interlocuteur ou
son destinataire un sujet passif, dépourvu de pouvoir de réagi et de choisir.
C’est se méprendre dans la communication.
Pour
communiquer, nous utilisons les outils que nous venons d’énumérer ci-haut
(écrit, geste,
images, arts) ou bien plus encore. Ces outils sont maniés par
l’homme. C’est celui-ci qui communique. Il est aussi vrai que les végétaux
entre eux, comme d’ailleurs cela se
passe entre ces derniers et nous, entretiennent quelque relation. L’homme se
soigne, se nourrit, se sécurise, … avec ces compagnons utiles. Il les protège
aussi ou les élève. Il faut un équilibre entre ces deux ; mais celui qui
décide c’est bien l’homme. Malheur, s’il décide de nuire à l’environnement,
puisqu’il se nuit. La relation entre homme et nature devrait trouver un nom
précis que « communication » (nom que je recherche encore !),
pour deux raisons :
3.1. Un peu d’humanisme
Par humanisme, il
nous est demandé d’user d’un langage plus clair et respectueux, qui ne
choque pas, et adapté à chaque réalité de la vie. L’homme est, en effet, sacré.
Le monde est ainsi structuré. Ainsi, on ne peut dire par exemple, « Je mange
du cochon », mais du porc. On ne dit pas « ma femme a mis bas »,
mais a mis au monde, etc. Pourquoi ne voudrait-on pas qu’il en soit ainsi
lorsqu’il s’agit de désigner l’opération par laquelle l’homme interagit avec la
nature ou les éléments de cette nature autres que l’homme, entre eux ?
3.2. Au-delà de l’humanisme
La
deuxième raison part de la première. Si nous convenons avec Roger MEHL que la
communication est le fait de l’homme, ce qui accroît ou affirme notre capacité
humaine, pourquoi appeler ce qui ce passe ente animaux et ou entre végétaux
« communication » ?
Ceci
nous ouvre la porte sur la capacité de ceux-ci à communiquer. Je ne veux pas
être prétentieux : je ne suis pas un végétal pour savoir réellement ce que
se disent ces derniers pour savoir s’ils communiquent comme nous. Au moins, je
suis sûr de ce que l’homme fait : il ne communique pas selon un seul
schéma. Il utilise plusieurs codes, plusieurs outils ou canaux.
Lorsqu’un
arbre tombe dans une forêt, en l’absence de l’homme. Qu’est-ce qu’il dit ?
Que communique-t-il ? A qui ? La réponse n’est pas évidente.
Puisqu’aucun homme n’a en été témoins. Mais si, de passage, il trouve cet arbre
à moitié brûlé, ou perforé à la souche avec des gros insectes qui pullulent, il
peut émettre des hypothèses : une foudre s’est abattue dessus, ou les
insectes l’ont rongé, ou encore, l’arbre a vieilli. Il y a de la chance que
cela soit vrai. Et s’il veut en savoir davantage, il procède par un teste, une
étude minutieuse d’un expert. La chance d’éviter les erreurs accroît. Voilà de
quelle manière l’homme, les actes humains communiquent.
Dans
« tout communique » de Paul Watzlawick, il y a cette dose d’inconnu,
d’une trop grande affirmation choquante et prétentieuse que je me demande « c’est
quoi qui communique ? si tout communique à la fois ». Tout communique :
quoi, à qui ? Et comment ? On ne peut savoir ni le destinataire, ni
le code, ni le contexte, … avec précision. On s’enfermerait dans les
interprétations, dans l’à peu près. Avec tous les dangers de se tromper surtout
que celui qui « communique » n’est pas de même culture que nous
(pensez à Roger MEHL : la culture comme base de communication), ne partage
pas avec nous le même langage, le même code, le même système de référence. Et
celui qui communique, ne peut ni rectifier, ni modifier sa communication s’il
n’est homme. Encore que, même entre hommes, la tâche n’est jamais facile.
« Une
bouteille à moitié vide trouvée dans une classe, sur un banc, que communique-t-elle ? »
demandait un condisciple dans une conférence du cercle de réflexion et de
débats AGORA- SIC/UNILU animée par un autre condisciple. On ne peut que se
livrer à des spéculations :
–
Son propriétaire l’a oubliée
–
Il n’est pas loin de là
–
Il s’est lassé, n’a pas pu la vider
–
Elle est piégée
–
Son propriétaire n’est pas ordonnée
–
Il est sorti d’urgence, malade
–
Il est sorti, chassé de la classe,
–
…
Bref,
tout est possible, tout n’est pas possible à mesure que les hypothèses
augmentent. Au moins une chose est sûre : la bouteille est à moitié vide,
sur un banc, dans une classe, seule. On n’en saura peut-être pas grand chose.
Cette bouteille n’a pas communiqué, celui qui l’a laissée, lui non plus, n’a
pas achevé sa communication. Mais on a au moins une idée sur ce qu’il
est : désordonné, imprudent, ne respecte pas l’environnement et la
propreté, etc. Mais ce n’est pas suffisant. Même si on devait prélever l’ADN
sur la bouteille pour identifier la personne. Et même alors, tout serait clair
seulement si l’on voyait la personne, si elle répondait à quelques questions
sur ses propres intentions, sur ses mobiles, …
Le silence et les gestes
L’Ecole
de Palo Alto affirme que l’« on ne
peut pas ne pas communiquer ».[17] Tout
communique donc. Même l’intension de ne pas le faire est une communication.
C’est cette affirmation qui m’a choqué dès la première fois que j’ai commencé à
m’aventurer à réfléchir sur les concepts et leurs implications, dans la vie, et
particulièrement en communication.
Il
est vari que lorsqu’on se tait au lieu de répondre, ou là qu’on attend sa
réponse, on inquiète, on dérange. Paresseusement on aime à appliquer le « Qui ne dit mot consent ». Probablement,
c’est pour dissuader celui qui se tait. Mais que c’est violent et paresseux à
la fois que de tirer une telle conclusion ! Pourquoi ne peut-on pas dire
que Qui en dit mot réfléchit ? Et s’il s’agit d’appliquer la peine de mort
à quelqu’un… On aurait tué quelqu’un qui n’aurait peut être pas été fautif. On
serait plus criminel que le crime réprimé en amont. L’esprit critique et de
discernement veut que l’on creuse, que l’on fouille de fond en comble pour
dénicher ce qui se trame derrière la bouche silencieuse. La justice développée
et scientifique recourt même à des testes scientifiques, médicaux, mentaux,
etc. pour éviter de tirer pareille conclusion.
Pour
celui qui se tait, du point de vue de la communication, il se mine. Car, il
ouvre la voie à des spéculations. Il vaut mieux répondre, même si les gens vont
emprunter le véhicule facile et le moins cher : la rumeur. On l’a vu le 20
février 2013, la presse italienne a prétendu avoir trouvé les vraies raisons de
la renonciation de benoît XVI. Les rédactions ont, à la surprise totale après
lecture des dépêches et commentaires, brillé pas des allégations hypothétiques (conditionnel
presque partout !) sur des prêtres et évêques proches des milieux gays. Le
Vatican qui voulait bien ne pas commenter cette « actualité » a tenu
à faire savoir que c’était faux, des « spéculations ». S’il n’a pas
réagit, dans ce monde à la quête du sensationnel et du buzz, imaginez le
danger… bref, la politique de la spirale du silence n’est pas très bonne en
gestion des situations sensibles.
Même
chose pour ce qui est des gestes et mimiques, et autres artefacts communicationnels.
Eléments très importants pour l’intercompréhension. Mais lorsqu’ils ne se
placent pas dans un cadre référentiel à tous les acteurs d’une communication,
on en arrive à des distorsions, à des incomplétudes. Boullet Michel constate à
juste propos que « tous les actes humains,
même ceux qui apparaissent les plus désintéressés, sont toujours remplis d’ambigüité
(…) ».[18]
Conclusion
La
communication est plus vaste et
complexe. Elle englobe beaucoup de paramètres, astuces et artefacts. Il faut
savoir en user pour communiquer de manière profitable pour soi-même et pour
l’autre. Mais tous les éléments utiles à la communication réussie ne sont pas
de même valeur. Il existe des instances, des instants et des faits de
communication qui ne peuvent pas communiquer. Il existe des choses incapables
de communique par elles-mêmes. Tout ne communique pas. Prudence !
Bibliographie
1.
Michel BOULLET, Le choc des médias,
Paris, Desclée, 1985, p.177.
2.
Edmond MARC, « Palo Alto :
l’Ecole de la communication », dans Philippe CABIN (Coord.), La communication, Etat des savoirs, Ed.
Sciences humaines, 1998, p.131.
3.
Michel MATTELART, Histoire des théories de la communication, Paris, La Découverte,
1995, p.18.
4.
Roger MEHL, La rencontre d’autrui, remarques sur le problème de communication, Neuchatel,
Ed. DELCHAUX, 1967, p.11
5.
SABBAH Hélène (Sous la Dir.), Littérature 2de, textes et
méthode, Hâtier, Paris, 1998, p.139.
6.
WINKIN Yves, Anthropologie de la communication, de la théorie au terrain, Bruxelles,
De Boeck, 2001, p.14.
[1] MARC
Edmond, « Palo Alto : l’Ecole de la communication », dans
Philippe CABIN (Coord.), La
communication, Etat des savoirs, Ed. Sciences humaines, 1998, p.131.
[2]
MATTELART Michel, Histoire des théories
de la communication, Paris, La Découverte, 1995, p.18.
[3] Ibidem, p.87.
[4] MARC Edmond, Ibidem, p.133.
[5] SABBAH
Hélène (Sous la Dir.), Littérature 2de,
textes et méthode, Hâtier, Paris, 1998, p.139.
[6] WINKIN
Yves, Anthropologie de la communication,
de la théorie au terrain, Bruxelles, De Boeck, 2001, p.14.
[7] Ibidem.
[8] MEHL
Roger, La rencontre d’autrui, remarques
sur le problème de communication, Neuchatel, Ed. DELCHAUX, 1967, p.11
[9] Ibidem.
[10] Ibidem.
[11] MEHL
Roger, op.cit.
[12] Ibidem,
p. 34
[13] Ibidem, p.41.
[14] Ibidem,
p.13.
[15] BOULLET
Michel, Le choc des médias, Paris, Desclée, 1985, p.177.
[16] MEHL Roger, Op.cit, p.7.
[17] MARC
Edmond, « Palo Alto : l’Ecole de la communication », p.131-133.
[18] BOULLET
Michel, Op.cit, p.176.
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