Pour faciliter la tâche du dialogue au facilitateur Edem Kodjo

Affiche de soutien au dialogue. Photo Didier Makal, décembre 2015, Lubumbashi
Conduire un dialogue, mieux, en être facilitateur, n’est pas tâche facile pour le togolais Edem Kodjo envoyé par l’Union africaine en RDC. Dans ce pays où dialoguer ne sert pas forcément à résoudre les problèmes qui se posent, le facilitateur a besoin qu’on lui facilite la tâche.
Pour qu’enfin se tienne le plus controversé des dialogues congolais, il faut faciliter la tâche au facilitateur. Kodjo, en effet, n’a rien compris à son rôle dans le dialogue initié par Joseph Kabila. Il n’a pas non plus compris ce que veulent les opposants congolais, d’où son incapacité à les amener à ce dialogue.
Il a fallu d’ailleurs qu’interviennent l’ONU, l’OIF et l’UE pour qu’espérer démarrer. Mais bing ! le facilitateur est bloqué ! C’est ce que dit dans une chanson, le musicien Koffi Olomide : « le soi-disant guide abungi nzela », traduisez : « le soi-disant guise a perdu la route ». Un guide, un facilitateur, en effet, c’est un connaisseur. Ce n’est pas une présomption.
Le dialogue, ça sert à se renforcer
Le dialogue, en contexte congolais, ça ne sert pas à résoudre les problèmes apparents. Non, là ce n’est que la pointe de l’iceberg. Le dialogue conforte les positions des régimes en place, et c’est une réalité depuis l’indépendance de la RDC. En 56 ans, en effet, le pays compterait environ 16 dialogues ou pourparlers nationaux. Pourquoi n’ont-ils souvent guère réussi à sortir le pays de l’instabilité politique et signer ainsi son décollage ?
Sous l’ère Kabila, en 15 ans de règne, environ 8 dialogues[1] (47%) ont eu lieu. Ni stabilité, ni développement n’ont suivi. Si à Pretoria les participants ont sauvé le pays de l’éclatement, si à Kampala le M23 a constaté son échec, … il y a eu surtout le chef de l’Etat qui a conforté sa position de « chef » ou homme fort.
Lubumbashi, Katumbi

Un facilitateur en déphasage
Edem Kodjo n’a probablement rien compris à tout cela. Il n’a pas non plus compris que parfois être opposant, en RDC, donne les raisons de refuser même des causes raisonnables. Il semble ne pas aussi considérer les aspirations des fougueux mouvements citoyens, portés par des jeunes qui ne craignent plus la prison. Ils veulent le changement, les élections. Kodjo n’a pas pu rapidement s’acclimater et sentir les mutations politiques congolaises.
Ce sont deux forces aux antipodes : les nostalgiques de l’ancien régime, presque jusqu’auboutistes, pour dire mobutistes. Ils sont prêt  ne rien lâcher avant d’avoir échoué. A l’inverse, ce sont des politiciens qui sympathisent avec la démocratie. Il leur reste au moins le temps de prouver leur metanoïa : le changement radical qui ferait de ces anciens collaborateurs de Kabila qu’ils critiquent, des prédicateurs du changement vu par Y’en a marre, Lucha et Filimbi qui les bousculent.
Pour tout cela, il faut faciliter la tâche au facilitateur pour que le dialogue ait la chance d’aboutir. C’est-à-dire, que l’Union africaine remplace Kodjo par un autre. Ce serait généreux, pour lui éviter des humiliations du genre récusation pour partialité.



[1] On peut citer Sun city, Pretoria, Addis-Abeba, Nairobi, Kampala, Amani, Concertations nationales et le Dialogue politique en attente depuis 2015.

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